Un débat parlementaire s’ouvre à la Chambre des députés. Le 8 mai 1891, Clemenceau réclame une amnistie générale. Elle est repoussée par 294 voix contre 191.
« Messieurs, est-ce que vous n’êtes pas frappés de l’importance qu’a prise cette date du 1er mai ? [...] que partout le monde des travailleurs était en émoi, que quelque chose de nouveau venait de surgir. Qu’est-ce que c’est ? Il faut avoir le courage de le dire, et dans la forme même adoptée par les promoteurs du mouvement ; c’est le quatrième État qui se lève et qui arrive à la conquête du pouvoir. [...]
Je savais bien que vous alliez me dire que la Révolution, faite il y a cent ans, a proclamé tous les droits et toutes les libertés. [...] Et puis l’industrie est venue, la mangeuse d’hommes, l’implacable industrie, qui a pris les développements que l’on sait, attachant l’ouvrier à la machine comme le serf était attaché à la glèbe. [Applaudissements à l’extrême gauche] [...]
Vous avez cru qu’il suffirait de leur dire : "Vous êtes souverains tous les quatre ans, le jour où vous déposez un bulletin de vote dans l’urne." [Applaudissements sur divers bancs, à gauche] Et vous avez pensé qu’ils se contenteraient de cette part congrue de souveraineté ? Quelle erreur ! Qui de nous s’en serait contenté ? Assurément, ce n’est pas moi. [...]
Eh bien, quand vous regardez ce qui s’est passé à Fourmies, [...] non, assurément, il y a une disproportion épouvantable entre les actes qui ont précédé la fusillade et la fusillade elle-même. Je n’ai pas à examiner comment les actes se sont produits ; cela ne fait pas partie de ma discussion.
Je ne veux pas le savoir. Mais, encore une fois, il y a disproportion monstrueuse entre l'attaque et la répression ; il y a quelque part, sur le pavé de Fourmies, une tâche de sang innocent qu’il faut laver à tout prix ! [...]
Je dis que le fait capital de la politique actuelle, c’est l'inévitable révolution qui se prépare. C’est l’organisation de ce quatrième État, dont je parlais tout à l’heure. Il faut en prendre votre parti ; ce quatrième État, vous devez ou bien le recevoir par la violence, ou bien l’accueillir à bras ouverts. [Très bien ! très bien ! à gauche]
Le moment est venu de choisir. [...]
"Sauvez-nous, nous, républicains !" Sauvez ceux qui nous ont aidés, soutenus dans les heures douloureuses, ceux avec qui nous avons fait la République et pour qui nous avons fait la République. »
Discours de Georges Clemenceau du 9 mai 1891.
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